dimanche 26 mai 2013

 
Le Nom des Gens (2010)
 
 
Michel Leclerc
 
 
Thèmes abordés: Identité, famille,  mémoire (Vichy/Algérie),  immigration, sans-papiers,  couple mixte, pédophilie, engagement, nationalité.
 
Résumé:
Bahia Benmahmoud, jeune femme extravertie, se fait une haute idée de l'engagement politique puisqu'elle n'hésite pas à coucher avec ses ennemis pour les convertir à sa cause - ce qui peut faire beaucoup de monde vu qu'en gros, tous les gens de droite sont ses ennemis. En règle générale, elle obtient de bons résultats. Jusqu'au jour où elle rencontre Arthur Martin - comme celui des cuisines - quadragénaire discret, adepte du risque zéro. Elle se dit qu'avec un nom pareil, il est forcément un peu facho. Mais les noms sont fourbes et les apparences trompeuses... 
 
Critique: Film extrêmement riche et revigorant, le Nom des gens alterne avec bonheur comédie et drame, passé et présent. Les deux personnages principaux sont extrêmement attachants car très approfondis et remarquablement interprétés. Très approfondis car ce sont des personnages palimpsestes. Face caméra, ils nous racontent leur histoire familiale d'où ils sont issus puis leur enfance et leur adolescence, incarnée par de jeunes comédiens. Leurs "moi" enfant ou adolescent n'hésite pas d'ailleurs à intervenir tout au long du film. Remarquablement interprétés ensuite: Sara Forestier fait de Bahia un tourbillon d'énergie qui emporte tout sur son passage et auquel rien ne peut résister alors que Jacques Gamblin dans un rôle plus sage laisse transpirer lui aussi de nombreuses émotions.
 
 
 
 
 Le rapprochement de ces deux personnalités qu'à priori tout oppose est extrêmement pertinent car il révèle à quel point ils sont proches et peuvent se guérir mutuellement. Héritiers d'un passé douloureux et encombrant, dotés d'une double identité problématique, ils n'ont tout simplement pas la même stratégie de "survie". Bahia affiche au yeux de tous le traumatisme sexuel qu'elle a subi dans son enfance par son absence de pudeur, son comportement de "pute politique", le viol consenti de son intimité. C'est Arthur Martin qui symboliquement la rhabille et lui permet de recouvrer sa dignité.


 Bahia claironne également sur tous les toits ses origines algériennes imitant en cela sa mère, passionaria post-soixante-huitarde de la cause des sans-papiers alors que son père adopte une posture soumise et mutique. Elle aide en cela Arthur Martin a digérer sa propre histoire familiale caractérisée par le non-dit voire le déni. Adepte de la stratégie camouflage, ses parents n'ont pas trouvé mieux que de le doter d'un nom porté par plus de 15 mille personnes en France. Mais le jour où sa mère se rend à la mairie pour faire refaire ses papiers d'identité, on lui renvoie à la figure son passé de petite fille juive grecque, traquée et cachée pendant la guerre pendant que ses parents étaient envoyés à Auschwitz.